2,3 millions d'€ d'indemnité de départ pour le directeur général du CPH: crispations avant l'assemblée générale qui devra valider ce montant
Une assemblée générale sera appelée à valider mardi le montant fixé comme indemnité pour le départ d'Alain Declercq, désormais ex-CEO de la banque CPH. Des coopérateurs s'émeuvent de la hauteur du montant (2,3 millions d'euros). Selon le président du CA, il est parfaitement justifié et a été fixé sur la base d'une carrière de plus de trente ans à la tête de la banque.
- Publié le 15-04-2024 à 21h06
L’assemblée générale ordinaire convoquée le mardi 23 avril prochain doit valider le montant des indemnités de départ d’Alain Declercq, CEO (Chief Executive Officer). La banque a mis fin unilatéralement à son contrat de dirigeant avec effet au 31 décembre 2023. Un coopérateur de la banque s’émeut du contexte de la procédure de licenciement. “Ce départ a été présenté à la Banque Nationale (organe de contrôle des banques) comme une rupture de contrat. C’est totalement faux dans la mesure où, dès 2022, le président du comité de direction Alain Declercq avait manifesté son souhait de prendre sa retraite anticipée”. Le montant des indemnités de rupture pose également question selon notre informateur : “2,3 millions d’euros bruts. Ce montant représente 35 % du dernier bénéfice enregistré par la banque”.
Doit-on s’attendre à une assemblée générale houleuse comme le prédit notre informateur ? Roland Gillet, président du conseil d’administration du CPH, professeur d’économie financière à la Sorbonne (Paris 1) et à l’ULB (Solvay), expert reconnu au niveau international, ne voit pas pourquoi il en serait ainsi. “L’ensemble de la procédure s’est déroulée de façon normale, dans les règles du droit et selon une volonté claire d’assurer sa pérennité à notre banque coopérative”.
La piste interne privilégiée avec Mathieu Desmet
M. Gillet explique le contexte du licenciement d’abord.
M. Declercq a effectivement évoqué un départ de la banque au plus tard en avril 2026, année de l'âge légal de la pension. La banque s’est donc mise à la recherche d’un successeur dès l’année 2022.
Mais le processus s’est accéléré. La banque avait mandaté un consultant spécialisé en ressources humaines (un chasseur de têtes comme on dit dans le jargon) pour sonder le marché et dénicher le bon profil pour succéder au désormais ex-CEO. “Nous avions sous la main d’excellents candidats extérieurs mais il s’est avéré qu’à nos yeux le profil idéal pour reprendre le poste de CEO était une candidature interne”.
C’est ainsi que Mathieu Desmet (Vaulx), membre du comité directeur du CPH depuis neuf ans, est devenu le nouveau CEO le 1er janvier 2024. “Les qualités de M. Desmet ont été validées par des spécialistes. Le conseil d’administration avait la conviction que s’il ne le nommait pas, il risquait de le voir partir ailleurs.”
Quant au montant des indemnités de rupture, elles reflètent les conditions classiques d’un contrat de rupture dans le secteur bancaire, explique M. Gillet. Le montant de 2,3 millions d’euros est proposé à l'AG par le comité de direction sur base d’un avis remis par le Comité de Nomination et de Rémunération (dont M. Gillet est le président). D’abord compte tenu de son apport pour la banque au cours de ces trente dernières années (”Alain Declercq a constamment démontré un leadership exceptionnel en guidant l’entreprise à travers des périodes économiques variées ; sous sa direction, la banque a réalisé des profits constants, a maintenu une forte réputation sur le marché et a gagné la confiance des parties prenantes”).
Et ensuite compte tenu du critère de l’ancienneté, sur une base arithmétique: l’indemnité de cessation de fonction est égale à 21 mois et 33 semaines de rémunération fixe. “Des spécialistes du droit, en l’occurrence le cabinet d’avocats Simon Braun, nous ont accompagnés dans cette procédure”, indique Roland Gillet. “En fonction des événements, c’est donc la meilleure solution, celle qui permet la meilleure transition. Oui, ce licenciement a un coût. Mais nous avons aujourd’hui un conseil d’administration en parfait ordre de marche qui contribue à la pérennité de la banque. Ce CA n’avait pas besoin de deux CEO, ni d’une belle-mère, en son sein”.
Un nouveau CFO également désigné
En effet, une nouvelle personnalité a rejoint le comité de direction au côté du nouveau président Mathieu Desmet, de Luc François (depuis 18 ans au CPH) et de Gabriel Lombet (dont le mandat d'administrateur exécutif doit être renouvelé pour une durée de six ans) : Christophe Carpentier de Changy. Sa nomination en qualité de CFO (Chief Financial Officer, directeur financier) pour une durée de six ans doit également être validée par l'assemblée générale mardi prochain.
Dans un premier temps, il était prévu que M. Declercq reprenne la casquette de CFO du CPH. “L’arrivée de M. de Changy, issu d’une grande banque (plus de 25 ans au sein de la CBC Banque et assurances), au sein de notre entreprise a pu se faire beaucoup plus vite que prévu. En fonction des circonstances, j’estime aujourd'hui que nous avons de la chance de pouvoir compter sur un CEO et un CFO tous deux de grande qualité”.
Le président du Conseil d'administration, au sein duquel on retrouve douze personnes (dont Jean-Jacques Cloquet qui fut CEO du parc Pairi Daiza et de l'aéroport de Charleroi), ne pense pas que le point relatif à l'approbation de l'indemnité de rupture fera des vagues parmi les coopérateurs (on y trouve des clients et des employés) lors de l’assemblée générale du mardi 23 avril. "Les choses sont claires, l'assemblée générale validera ce point".
Plus de 30 ans à la tête du CPH, à la base de la cession des activités de la CET
Désormais ex-directeur général de la banque CPH, Alain Declercq est entré en fonction en mai 1993, il y a plus de trente ans. La banque occupe aujourd'hui 220 personnes réparties sur une trentaine d’agences basées dans sa province historique, le Hainaut, mais aussi en Brabant wallon et dans le Namurois.
M. Declercq a joué un rôle clé dans la croissance de la banque dont le siège social est établi à Tournai (rue Perdue). C’est lui, notamment, qui a mené à bien les négociations pour la cession des activités de la Caisse d’épargne de la Ville de Tournai (CET) au Crédit professionnel du Hainaut (CPH), deux institutions ayant des racines tournaisiennes.
Il a aussi placé la SCRL (Société coopérative à responsabilité limitée) wallonne dans une dynamique locale. Alors que le projet de parc zoologique n’en était encore qu’à ses balbutiements, à Brugelette, le CPH avait largement soutenu ce projet devenu plus tard la success story Pairi Daiza. Il est aussi administrateur au sein de Wappinvest (un fonds d’investissement ayant pour mission d’accompagner et de financer les entreprises de Wallonie Picarde).